Meeting d’Automne (Pavezin, 1921)

vendredi 25 septembre 2020, par velovi

Bien que le 23 octobre dernier, le temps nous ai fait grise mine, notre meeting au col de Pavezin a eu le succès habituel, et nous nous sommes trouvés plus de quatre-vingts cyclo-touristes, venus de tous les coins de l’horizon.
M. et Mme Prat étaient venus de Paris tout exprès pour y assister et nous apporter les sympathies de l’A.C.P., où le cycliste compte beaucoup d’amis. Les lyonnais étaient nombreux, les stéphanois plus nombreux encore, et Bourg-Argental, Annonay, Chasse et autres lieux furent représentés. Peu de dames, peu de tandems, un seul appareil de cabcyclisme, le porte-bébé toujours admiré de M. Martin. La pluie du matin avait, contrairement au dicton, arrêté quelques pèlerins. Il soufflait là-haut un vent sauvage et froid et de courtes averses alternaient avec de chauds rayons de soleil. Le temps changeait et, après la période de beaux jours se succédant sans interruption depuis le mois d’août, nous allions entrer sans transition en plein hiver. De fait, nous fûmes favorisés de la dernière à peu près belle journée de la saison.
La surprise de ce meeting fut la soudaine arrivée d’une douzaine de jeunes cyclotouristes lyonnais, groupés dans une Société de fondation récente, Le Lyon Routier, dont le président nous déclara tout net qu’il ne partageait pas nos idées sur ce que doit être la bicyclette de tourisme  ; que lui et les siens ne montaient que des machines légères équipées comme celles des coureurs du Tour de France, boyaux, roue à retournement et deux développements, 4 m. 80 et 5 m. 80 ou 4 m. 25 et 5 m. 25  ; et qu’il tenait nos polys pour machines à faible rendement, ne permettent ni les allures vives, ni par conséquent les longues randonnées.
Je fus un peu surpris, car depuis longtemps nous n’avons plus eu à faire de ces expériences comparatives sur le terrain, qui furent, il y a vingt ans, monnaie courante à l’E. S. Nous voilà donc avec quelques belles randonnées en perspective pour le printemps prochain. À la vérité, le Lyon Routier est déjà des nôtres puisqu’il s’est armé de deux développements et le débat n’aura lieu qu’entre deux dispositifs de polyxion, le système primitif limité à deux développements, trop rapprochés à notre avis, et les systèmes modernes qui admettent une gamme plus complète de développements interchangeables en marche.
De ces derniers systèmes il y eut grande variété à Pavezin. Des bi-chaînes combinées avec flottantes ou avec moyeu 3 vitesses, des flottantes seules ou combinées avec moyeux à 2 et à 3 vitesses, ma vieille trichaine de 1904 à roues de 60 centimètres, les trois dispositifs de rétro qui ont survécu, Hirondelle, Magnat et Terrot, puis des dérailleurs, encore des dérailleurs, toujours des dérailleurs. Les Chemineau, comme d’habitude, remportaient de beaucoup par leur nombre, puis les As, qui lentement mais sûrement se font leur place au soleil et les Audouard. Le Chemineau présentait un nouveau type à 2 vitesses seulement qui, comme l’As, double très avantageusement le 2 ou 3 vitesses d’un moyeu à engrenages. Ces derniers étaient en comme assez nombreux, mais presque toujours en combinaison avec d’autres systèmes.
Le vent tournait de plus en plus à l’aigre, on avait pris le café, échangé maints joyeux propos, on avait fait une abondante cueillette de beaux marrons tombés sur la route et abandonnés, les photographes braquèrent leurs appareils et les mains se serrèrent une dernière fois. À 14 h. , tout le monde s’ébranla et, en compagnie de quelques amis, je hissai mon carrosse de gala à la croix de Chaubourey, où régnait déjà un brouillard glacial, qui dans la nuit se tranforma en une épaisse couche de neige.
Ainsi finit notre troisième meeting de 1921. Trois meetings en une année, c’est peut-être le record  ! À tous, nous nous trouvâmes cependant très nombreux et l’on y vint même de loin. Ceci démontre que les cyclotouristes sont gens sociables, aimant à se rencontrer fréquemment et je crois que si l’on pouvait provoquer de telles réunions dans toute la région elles auraient partout beaucoup de succès.
Je me permets donc à nouveau d’engager les lecteurs du Cycliste qui sont les centurions de l’armée cyclotouristique française, de prendre chacun dans sa région, l’initiative de ces réunions amicales et utiles.
À Paris, depuis deux ans déjà, quelques flottantistes réunissent au printemps les cyclotouristes de la région parisienne pour leur démontrer les avantages de ce très simple moyen de polyxer la première machine venue et en même temps pour examiner et comparer tous les autres dispositifs et les quelques nouveautés qui s’y manifestent [1].
Pourquoi, à Lyon, à Marseille, à Bordeaux, etc., d’autres amis du Cycliste, partisans de notre méthode de propagande par le fait et par l’exemple, n’en feraient-ils pas autant  ? Un premier avis dans le Cycliste, puis quelques notes dans les journaux locaux pour attirer l’attention de tous les cyclistes de la région, et enfin une invitation à se réunir en un site agréable pour s’entretenir des moyens de développer la pratique du cyclotourisme  ; il n’en faudrait pas davantage pour grouper autour de nous les nombreux isolés qui, faute d’un centre de ralliement où leur ardeur puisse se retremper, risquent de se laisser aller au découragement.
Les meetings du Cycliste ne peuvent guère s’éloigner des points de concentration accessibles aux cyclistes des régions lyonnaise, stéphanoise et de la vallée du Rhône jusqu’à Valence, car c’est de là que viennent les plus gros contingents. Or, l’expérience prouve que très peu de cyclotouristes consentent à faire plus de 50 kilomètres pour se rendre à notre appel, d’autant plus qu’il s’agit toujours de parcours accidentés.
Quand nous fixons un meeting à Villechenève par exemple, il est impossible aux Annonéens d’y venir et si nous le fixons au lac de Paladru, les Stéphanois, malgré leur vaillance proverbiale, n’y figureraient qu’en très petit-nombre, car on aime généralement rester quelques heures ensemble, ne serait-ce que pour inspecter les machines des uns et des autres.
Nous continuerons donc à convoquer, au moins une fois par an, les amis du Cycliste, tantôt ici et tantôt là, entre la vallée du Rhône et les crêtes du Pilat, mais nous espérons être convoqués à notre tour par les groupements des départements voisins, et la fréquence des meetings qui naîtront d’une telle émulation, sera des plus favorables à la diffusion du cyclotourisme, but toujours poursuivi.

Vélocio.


[1On nous informe déjà que le meeting des flottantises aura lieu en 1922, fin mars ou commencement d’avril, au Polygone de Vincenne. Les précisions nécessaires seront données dans le prochain numéro.

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