Nourritures

jeudi 1er septembre 2022, par velovi

«  Vélocio y est pris d’une fringale telle que, malgré la hâte que nous avons de gagner Annonay avant la nuit et un nouvel orage, nous stoppons pour nous lester d’une légère collation.
Les bons aubergistes villageois ne sont pas habitués à servir des gens aussi pressés que des cyclotouristes de notre acabit, aussi le plus souvent notre hâte les ahurit et finit même par les immobiliser complètement.
Vélocio donne presque une jaunisse à l’hôtesse de Saint-Jeure par son impétuosité à lui arracher des mains le pain et l’omelette qu’elle apportait tranquille et souriante, d’un pas de sénateur.
Nous pouffons de rire de le voir si féroce et si amusant dans ce rôle. Au huitième morceau de pain son visage heureusement se rassérène, son œil s’attendrit et nous saluons d’un hourrah le retour de notre chef à son aménité proverbiale.  »

Mad Symour, Le Cycliste, 1902, p.115

Le cyclo-tourisme ouvre toujours l’appétit, la nourriture fait partie de ses plaisirs. Le prosélytisme de Vélocio pour le végétarisme et le moteur à pommes à partir de 1896 a connu moins de succès que celui pour la polymultipliée. Si des soucis digestifs l’avaient porté vers ce régime à la quarantaine, il s’accordait des écarts en groupe. Quant à l’alcool, il ne dédaignait pas la bière en cours de route, et avait un faible pour la clairette de Die lors de ses passages au col du Rousset. Les liqueurs arrosant les premières sorties des groupes vélocipédiques ont par contre bel et bien disparu de ses randonnées. Il s’intéressait à ce que l’on appellerait aujourd’hui la diététique de l’effort, et se préparait l’équivalent de nos barres énergétiques.

 AU PAYS DU SOLEIL, 1889

«  Nous stoppons un instant à l’angle des routes de Carpentras et de l’Isle-sur-Sorgues, pour secouer la poussière qui nous envahit à l’intérieur comme à l’extérieur. À l’extérieur, passe encore, le vent nous en enlève autant qu’il nous en met, mais à l’intérieur il faut absolument arroser. Du vin blanc muscat avec de la limonade (la dernière bouteille que possède l’établissement) nous fournissent un mélange délicieux que nous ingurgitons avec délices.  »
Vélocio, «  Au Pays du Soleil  », Le Cycliste, janvier, mars 1890, p. 346-349, p.45-49, Source Archives départementales de la Loire, cote PER1328_2

 AMBÉRIEU À AMBÉRIEU, 1898

«  Mon repas du soir dans un petit cabaret, 2 ou 3 kilomètres avant Saint-Rambert, se compose d’un grand bol de lait et de fruits  ; je me trouve trop bien du régime végétarien pour m’en départir jamais. Quand on sort de table, il semble que l’on mangerait encore, et une demi-heure après, on se sent solidement réconforté parce que l’assimilation est parfaite.  »
Vélocio, «  D’Ambérieu à Ambérieu », Le Cycliste, Août 1898, re-publié en 1948, Rétrospective p.151 

 VERS LA MÉDITERRANÉE, 1899

«  À Barbentane, à l’angle de la route qui conduit à la gare, je fais une halte au café Bonjean et suis heureux d’y retrouver en bonne santé les propriétaires auxquels je fus redevable il y a dix ans de soins vraiment dévoués, alors que revenant de Tarascon où j’avais bu quelque drogue sans doute frelatée, je tombai là comme si le choléra s’était abattu sur moi. Ce fut une nuit mouvementée et mon ami F... que j’avais emmené de Saint-Étienne à Aigues-Mortes, craignit un instant de perdre son compagnon et de rentrer comme le page de Marlborough, porteur de tristes nouvelles.
Je passe cette fois en excellente santé et je déguste avec plaisir quelques tranches de melon vert, eau parfumée dont j’arrose un de ces pains pâlots d’un usage courant dans le Midi et qui, quoique peu cuits, sont de digestion facile.  » […]
«  Enfin, me voici en présence d’un assortiment de coquillages, praires, clovisses, moules, huîtres et oursins, et un flacon de vin blanc, coût  : 3 francs et plutôt du malaise que du bien-être pour l’estomac. Que j’aurais donc agi plus sagement en déjeunant, suivant mon habitude, d’une assiettée de riz. On est toujours plus ou moins victime des vieux préjugés qui, au moment où on s’y attend le moins, surgissent comme les diables des boîtes à surprises et nous font faire des sottises.
En me retrouvant sur la Cannebière une folle envie m’était venue de manger à la façon d’autrefois et j’y cédai. Oh ! je n’en fus pas malade, mais, je le répète, à quoi bon imposer à l’estomac humain la digestion d’aliments qui ne lui conviennent pas ? et cela simplement pour satisfaire à quelque dépravation du goût ?  »
Vélocio, «  Vers la Méditerranée », Le Cycliste, 1899 et 1900, p.216-22, p.243-246, p.36-41, Source Archives départementales de la Loire, cote PER1328_6 et Le Cycliste, Décembre 1957, Rétrospective «  Cyclo-Alpinisme à la Sainte-Baume  »

 UN RAID DE 600 KM À BICYCLETTE, 1900

«  Nous suivons lentement, très lentement les quais, toujours bousculés par le vent et n’obtenons enfin un peu de répit qu’en arrivant sur le vieux port juste à midi. Je cédai à une vieille habitude et malgré les protestations de mon estomac et les objurgations de ma raison, je demandai chez Pascal une bouillabaisse au lieu d’un plat de lentilles qui figurait justement au menu du jour. Mon compagnon, un homme du Nord, qui voyait la bouillabaisse pour la première fois, n’en sut pas apprécier la saveur toute méridionale. Pour aimer les bonnes choses, il faut être du Midi.  »
«  C’est pour cela que depuis que je me suis voué à l’eau, aux céréales, aux légumes et aux fruits, j’ai pu, sans me fatiguer autant qu’autrefois, augmenter sensiblement en longueur mes étapes en même temps que je les augmentais en hauteur, grâce à mes multiples développements qui me permettent, quelle que soit la résistance à vaincre, de faire sur ma pédale juste l’effort dont mes muscles sont capables au moment considéré.  »
Vélocio, «  Un raid de 600 km à bicyclette », Le Cycliste, 1900, p.66 à 72, Source Archives Départementales de la Loire, Per1328_7

 DE SAINT-ÉTIENNE À CANNES ET RETOUR PAR LES MAURES ET L’ESTÉREL, 1900

«  Il fait bien chaud, la poussière est pénétrante et la faim se fait sentir, la soif aussi, ma chaîne elle-même est altérée, elle grince  ; je la détache et la mets pendant le repas dans un bain d’huile épurée faute de mieux  ; elle n’a plus rien dit de tout le voyage  ; notre estomac n’a pas été aussi complaisant. Nous déjeunons de façon végétarien  : omelette, petits pois, pommes de terre, salade et fruits, dans un hôtel à droite en entrant dans la ville  ; on y est bien, sans luxe, mais proprement et promptement servi. Deux cyclistes du pays, cela se reconnaissait à l’assent, se mettaient à table quand nous arrivâmes, nous échangeâmes quelques propos  ; ils allaient à Saint-Rémy, c’est à-dire dans une direction opposée à la nôtre.  »
Vélocio, «  De Saint-Étienne à Cannes et retour par les Maures et l’Estérel », Le Cycliste, 1900, p.105 à 114, Source Archives Départementales de la Loire, Per1328_7

 EXCURSION DE PÂQUES (596 KILOMÈTRES), 1901

«  En arrivant au pied des Alpines, alors qu’il s’agit de conquérir les 250 mètres d’altitude qui nous séparent du sommet, nous nous sentons défaillir  ; le pain, les pommes, les oranges, les brassadors, tous les menus aliments dont nous nous sommes sustentés depuis Valence pendant 150 kilomètres, tout s’est évanoui, brûlé par les muscles, sucé par le soleil  ; la fringale, la hideuse fringale est à la porte de notre estomac. Que faire  ? La carte nous indique que nous sommes loin de tout village. M. A. nous tire heureusement d’embarras en nous conduisant à un café champêtre caché dans les oliviers à un kilomètre de là  ; un bol de lait, des œufs, des pommes, du pain, de l’eau et de la limonade, nous voilà rechargés pour 100 kilomètres.  »
Vélocio, «  Excursion de Pâques (596 kilomètres)  », Le Cycliste, 1901, p.60-64, Source Archives Départementales de la Loire, Per1328_7

  EXCURSION DE LA PENTECÔTE AU MONT VENTOUX, 1901

«  Nos estomacs commençaient d’ailleurs à s’impatienter et c’est avec un plaisir sans mélange que nous nous installons à la salle à manger de l’hôtel autour d’une table bien servie sur laquelle fume un excellent potage. Malheureusement, la nécrophagie est aussi en honneur au sommet du Ventoux que partout ailleurs, et ce sont presque uniquement des plats de viande qu’on nous sert. L..., qui n’est végétarien qu’à l’occasion, s’en accommode facilement, mais cela ne fait guère notre affaire à Vélocio et à moi. Nous nous rabattons sur le pain qui est bon, et Vélocio finit par se laisser tenter par une tranche de gigot  ; mais c’est là un gros écart de régime dont il se repentira bientôt, car il souffrira tout le soir et une partie du lendemain d’un sérieux embarras d’estomac qui lui rendra le retour singulièrement plus dur et moins agréable.  »
Ch. R.
R.,Ch., Excursion de la pentecôte au mont Ventoux  », Le Cycliste, 1901, p.103-108, Source Archives Départementales de la Loire, Per1328_7

 EXCURSION PASCALE, 1905

«  Dans un bar à gauche, à l’abri du mistral, nous réparâmes non seulement le pneu, mais notre estomac, en faisant une longue entaille dans un plum-pudding au riz que j’avais emporté et que je recommande comme excellent et agréable reconstituant en cours de route. Il conviendrait seulement de le faire confectionner sous une forme plus portative et plus maniable que la forme classique de ces substantielles friandises. On pourrait par exemple les mouler en cylindres de 5 ou 10 centimètres de hauteur et de 2 ½ à 3 centimètres de diamètre qu’on logerait facilement dans des tubes en papier-linge qui, vides, tiendraient très peu de place. On aurait ainsi, sous la main, des cartouches de 10, 20 ou 30 kilomètres promptement digérées et assimilées. De semblables cartouches de macaroni ou de tout autre aliment végétarien seraient également utiles et il serait intéressant de faire en cours de route des expériences comparatives entre la valeur nutritive de ces différentes alimentaires, que dans un temps plus ou moins éloigné nous trouverons sans doute chez tous les pâtissiers.  »
[...]
«  Mon étape du lendemain se borna à 160 kilomètres d’Arles à Valence d’où je rentrai par un train de nuit. Je n’avais quitté Beaucaire qu’à 9 heures avec mon ami A., toujours rétroïste habile et convaincu  ; nous avions déjeuné longuement à Valliguières et rien ne me pressait. En puisant à Remoulins je m’étais lesté de quelques sacs de croquignolles, un petit biscuit aux amandes qui est le viatique le plus agréable et le plus riche en calories que je connaisse. J’en croquai 250 grammes et je ne mangeai pas autre chose jusqu’à Valence  ; le vent pourtant m’était contraire et me fit dépenser bon nombre de kilogrammètres. On fabrique ces croquignolles à Montfrin, dans le voisinage de Remoulins.  »
Vélocio, «  Excursion pascale  », Le Cycliste, avril 1905, p.66-74, Source Archives Départementales de la Loire, cote PER1328_8

 NOËL AU SOLEIL, 1905

«  Je grimpai avec 2m,40, afin de ne pas être en moiteur en abordant la longue descente, et j’atteignis à 7 heures le col des grands bois. Je n’en repartis qu’à 8 heures. Mon pneu AR, trop mou et très chargé, car dès le commencement de la descente j’avais laissé aller ma selle tout à fait en arrière, se heurta à je ne sais quoi de dur qui pinça et mâcha la chambre à air. Je dus aller à pied jusqu’à l’hôtel Courbon où je déjeunai d’abord, je réparai ensuite avec beaucoup de précaution, je gonflai très dur cette fois, j’inspectai soigneusement les freins et j’arrimai encore plus solidement mon bagage  ; à l’arrière, le linge de rechange roulé dans la pèlerine et les jambières, plus une sacoche contenant des cartes, du carbure, les burettes d’huile et de pétrole, un peu d’alcool pour mêler à l’eau de ma lanterne à acétylène et l’empêcher de se congeler, accident fréquent en hiver et qui, un certain soir, m’avait fort ennuyé  ; à l’avant, mes deux besaces, qualifiées si justement de mamelles nourricières par Alpinus, contenaient des provisions de bouche suffisantes pour deux jours, cartouches alimentaires faites de riz au lait très sucré et bourré de raisins confits, des chaussons aux pommes, des oranges, des croquignolles, délicieux biscuits aux amandes que fabrique à ses moments perdus et quand ça lui plaît, un confiseur original dont je ne vous donne pas l’adresse, car il y a dix chances contre une que vous n’en obtiendriez même pas de réponse  ; enfin, du chocolat. Vous voyez que pour être végétarien on n’en a pas moins beaucoup de bonnes choses à sa disposition.  »
[…]
«  À dix kilomètres d’Apt environ, je tourne à droite, traverse le ruisseau et la voie ferrée et me dirige vers Bonnieux que l’on aperçoit déjà haut perché sur la crête de la montagne et baigné de soleil. La montée n’est pas très dure, la route a été rectifiée et n’exige pas un développement plus faible que 3m,80, je n’ai même pas recours aux poignées basses et je monte lentement entre deux haies de buissons remplis de ces petites baies rouges qu’on appelle des pommes d’oiseaux  ; je les aime assez pour qu’à plusieurs reprises j’en mange à poignées, et me voici à une première église toute neuve bâtie au pied du bourg  ; l’autre église, la vieille, est tout au sommet  : j’y arrive par un grand lacet, puis je continue à grimper pendant un ou deux kilomètres avant d’atteindre le sommet de la montagne d’où la vue sur Bonnieux et au delà est très agréable.  »
[…]
«  Comme il est difficile, pour ne pas dire impossible, d’obtenir dans les hôtels où l’on est bien forcé de descendre, surtout lorsqu’on voyage en compagnie, des menus réellement végétariens, j’en ai pris mon parti et je me contente de l’ordinaire, toujours trop chargé en viandes de toutes sortes, dont j’élimine seulement les plats qui me semblent les plus cuisinés. Une bonne suée post-prandiale contribue à l’élimination des autres, et, à la condition de ne pas récidiver trop souvent, on n’introduit pas, ce faisant, tellement de poison dans l’organisme que celui-ci ne puisse s’en débarrasser aisément et promptement grâce à la sévérité du régime at home où je n’admets pas d’infraction. Quand je voyage seul, c’est tout différent  ; toute la journée je vis sur mes provisions, et le soir à l’hôtel, je me contente d’un potage et de fruits sans préjudice de quelques cartouches alimentaires que je tire de mes besaces si je me sens un gros appétit. Mais on ne peut imposer de telles façons de vivre à des compagnons de route pour qui le végétarisme est lettre morte. Faire bande à part est gênant pour tout le monde  ; afficher une intransigeance irréductible et manger du pain sec à côté d’un menu qui plaît à tous les autres, c’est bien ostentatoire et pharisaïque  ; à moins, bien entendu, qu’on ne soit affligé d’une santé tout à fait précaire qui ne permette pas la moindre infraction à un régime rigoureusement déterminé. Mais il est probable que lorsqu’un végétarien en est réduit là, il ne va plus courir les grandes routes. À d’autres points de vue, à celui de la propagande en faveur de l’alimentation végétarienne, par exemple, il n’est pas mauvais que celui qui vient d’affirmer que grâce à cette alimentation il se porte mieux, qu’il est plus invulnérable qu’autrefois, le prouve en s’exposant volontairement, soit à table, soit dans un hôpital, soit sous un climat meurtrier, quand les circonstances l’y contraignent ou seulement l’y invitent, à une intoxication momentanée et accidentelle dont il n’a rien à redouter. Il convaincra ainsi plus vite ceux qui l’observent de la valeur hygiénique de son régime habituel, plus vite, dis-je, qu’en se calfeutrant dans de la ouate et en prenant la fuite devant une côtelette. Cette digression était peut-être utile afin de rassurer ceux qui pourraient s’étonner d’entendre un homme prêcher le végétarisme, la vie simple, le retour à la nature et de le voir à l’occasion hurler avec les loups, c’est-à-dire manger une aile de poulet en compagnie de créophages. Jusqu’à présent, nous n’avons guère converti au végétarisme que des malades qu’une ordonnance du médecin ou leur propre bon sens obligeait à une sévérité de régime excessive. En fait de végétariens, me disait un jour une dame à laquelle je conseillais le retour à la nature, vous ne me montrez que des gens maigres, chétifs et valétudinaires  ; je me convertirai quand vous me ferez voir parmi vous des visages respirant la santé. Il nous reste donc à conquérir les estomacs bien portants et nous ne devons pas les effrayer par trop de rigorisme.  »
Vélocio, «  Noël au soleil  », Le Cycliste, décembre 1905, Page 224 à 230, Source Archives Départementales de la Loire, cote PER1328_8

 RANDONNÉE PASCALE, 1907

«  L’appétit qui ne perd jamais ses droits montre les dents et l’estomac réclame quelque chose de chaud après ces heures passées dans le brouillard que les tout premiers rayons du soleil mettent enfin en déroute. Nous aurions déjeuné volontiers au Pont de Bonpas, mais tout y dort encore  ; à Orgon, tout est clos. Enfin à Senas, à 7 heures, un hôtel ouvre ses volets à l’instant précis où j’arrive, Dupuy ayant fait halte à Orgon où il nettoie ses chaînes pour la ne fois. Après un déjeuner substantiel, café au lait, œuf à la coque, beurre et confiture, à mon tour je débarrasse mes roues libres de la boue qui les englue et nous filons grand train désormais, à 8 heures.  »

Vélocio, «  Randonnée pascale  », Le Cycliste, mars 1907, p.41 à 45, Source Archives Départementales de la Loire, cote PER1328_9

 CURE DE PRINTEMPS,1910

«  Le cyclotouriste au cours d’une longue étape doit savoir manger à propos et ne pas s’imaginer perdre du temps quand il s’arrête, au moment psychologique, une demi-heure pour manger et boire tranquillement  ; il en gagne au contraire. Se tenir le plus longtemps possible sous pression en grignotant à bicyclette tantôt un fruit, tantôt un morceau de pain, tantôt quelque cartouche alimentaire habilement composée, telles que, par exemple, les croquignolles (amande, sucre, beurre et farine), des madeleines au riz (riz, sucre, lait, pruneaux), des canougats (beurre, miel, sucré et chocolat) qui sont même des friandises  ; mais il faut, à certains intervalles plus ou moins rapprochés, suivant que la dépense d’énergie a été plus ou moins grande, il faut s’alimenter plus copieusement, remplir l’estomac.  »

Vélocio, «  Cure de printemps  », Le Cycliste, Avril 1910, p. 63 à 72, Source Archives Départementales de la Loire, cote PER1328_11

 UNE DE PLUS, 1912

«  Le sol est très mou, les arbres déversent sur moi leur trop plein d’eau et je pénètre, dès la sortie de la ville, dans un brouillard intense à ne pas voir quand je suis au milieu de la chaussée les bords de la route. À la montée, cela n’a pas beaucoup d’importance, mais je n’en suis pas moins forcé de mettre pied à terre quand j’entends descendre une voiture. Ma lanterne m’est très utile  ; sans elle, j’aurais dû monter à pied. Je sors du brouillard à mi-descente et, à partir de Bourg-Argental je puis marcher à grande allure  ; le vent m’est et me restera favorable tant que je ne ferai pas face au nord. Me voici à Andance à 5 heures, en retard de 25 minutes sur mon temps ordinaire  ; mais je traverse Valence à 6 h. 30, Saillans à 8 h. 35, après quoi le vent contraire me gêne quelque temps et je m’arrête pour la première fois à Luc-en-Diois (178 kilom.) à 11 heures. J’ai pu aller jusque-là sans manger ni boire, m’étant bien lesté, au départ, d’un potage de flocons d’avoine au chocolat.  »
Vélocio, Le Cycliste, Juin 1912, p. 125-133, Source Archives départementales de la Loire cote PER1328_12 

 SAINTE-BAUME ET VENTOUX, 1913

«  À 19 heures, nous nous éloignons d’Aix par la route suivie le matin et qui, de pente rapide, est devenue rampe dure qu’il faut faire avec 4 mètres. Ce coup de collier donné, nous reprenons la bonne allure, souvent avec 8m,15, malgré le vent, et nous descendons à 20 heures et quelques minutes à Lambesc, hôtel de l’Union, où nous avions déjeuné juste douze heures auparavant. La confiture de marrons que nous y avions goûtée le matin, et dont nous sommes tous deux très friands, fut pour beaucoup dans le choix de ce petit hôtel, où nous fûmes d’ailleurs bien traités.  »
[…]
«  Allons vite à Bedoin, mais d’abord déjeunons. Olives noires, beurre et chocolat, coût 1 fr. 25  ; c’est un peu cher, mais l’Isle-sur-Sorgues se hausse du col depuis que la fontaine de Vaucluse est classée parmi les curiosités naturelles fréquentées par les autos. Nous pédalions tranquillement, croisés à chaque instant par des paquets de cyclistes, des charretées de paysans, des voiturées de citadins, juchés en grappes les uns sur les autres à se demander comment au moindre cahot il ne s’en décrochait pas quelques-uns, lorsqu’un jeune motocycliste, pavoisé de blanc et de bleu, nous rattrape et se met à notre pas.  »
Vélocio, «  Sainte-Baume et Ventoux  », Le Cycliste, 1913, p.111-117, Source Archives Départementales de la Loire, cote PER1328_12

 MEETING DE PRINTEMPS, 1919

«  La surprise du meeting fut cependant la soudaine apparition d’une équipe parisienne de tandem mixte qui tout en nous apportant des nouvelles de nos amis de l’A. C. P., nous donna une pratique leçon de choses, en déployant à l’heure du repas son matériel de cuisine en plein air et en cuisinant fort bien œufs, légumes, côtelettes, thé et café, non seulement pour eux-mêmes mais encore pour leurs voisins.
Cette solution d’un problème aussi important que celui de l’alimentation en cours de route, est assurément élégante et la méthode de l’E. S. paraît un peu fruste à côté de celle de l’A. C. P., que je n’adopterai pourtant pas en ce qui me concerne  ; je me contenterai toujours comme je me suis contenté à Peyraud, des provisions contenues dans mon sac de guidon et qui me fournirent le 1er juin 500 grammes de pommes de terre écrasées dans 20 grammes d’huile, 600 grammes de cerises et 200 grammes de chausson à la confiture  : avant de partir, le matin j’avais déjeuné comme d’habitude de 350 grammes de pain dans un grand bol de café au lait et je dînai le soir de 250 grammes de pain dans un litre de lait froid. À un tel menu rien ne manque et ma réserve d’énergie n’a pas été entamée d’un kilogrammètre, malgré le soleil ardent et les 1.800 mètres d’élévation que nous enlevâmes, le soir comme le matin, à très vive allure.  »
Vélocio, «  Meeting de printemps  », Le Cycliste, Juin Juillet 1919, p. 69-74, Source Archives départementales de la Loire, cote PER1328_13

 COL DU ROUSSET – FORÊT DE LENTE, 1919

«  Entre Tournon et Andance, je commençai à avoir faim  ; nous nous arrêtâmes un instant pour manger quelques cerises, en attendant la collation plus substantielle que nous avons toujours l’habitude de prendre à Andance avant d’attaquer les 1.100 mètres d’élévation qui nous séparent là du col des Grands Bois. Malheureusement cette collation fut insuffisante.
Pas de lait dans lequel j’aurais trempé quelques centaines de grammes de pain, et, faute de sucre, ni café ni mélange eau et vin pouvant pour cette trempette suppléer le lait. Je dus me contenter de pain et de fromage secs autant l’un que l’autre, et je ne pus manger suffisamment. Aussi fus-je un peu terne au début de la montée. Peu à peu néanmoins les forces revinrent à mesure que le pain et le fromage s’assimilaient et me fournissaient des calories et si j’avais pu trouver un bol de lait tout eût été pour le mieux. Mais trouver du lait dans des villages où les vaches encombrent la route, c’est tout aussi impossible que d’aller dans la lune. Ni à Davézieux, ni à Boulieu, ni à Saint-Marcel, pas plus chez les paysans que chez les aubergistes, je ne pus en obtenir une tasse. J’aurais, je l’avoue, obtenu plus facilement, de l’absinthe  ! On vous regarde même de travers quand dans une salle enfumée où des hommes et des femmes avinés s’alcoolisent, on ose demander un verre de lait.
J’en trouvai enfin dans un hôtel à Bourg-Argental où je fus bientôt rejoint par L..., qu’une crevaison avait retardé et par Émile C... qui, partie par le train, partie par la route, en regonflant son pneu de temps en temps, nous avait suivis et rattrapés.  »
Vélocio, «  Trois expériences  », Le Cycliste, Juin-Juillet 1919, p. 69-74, Source Archives Départementales de la Loire, cote PER1328_13

  RANDONNÉE EXPÉRIMENTALE, 1921

«  À Peyrins, je bois une bouteille de bière, car l’eau que j’ai goûtée çà et là ne me paraît ni fraîche ni de goût agréable, je n’en ai la bouche que plus pâteuse  ; coquine de clairette  !  »
Vélocio, «  Randonnées expérimentales  », Le Cycliste, Sept 1921, p.65-70, Source Archives Départementales de la Loire, cote IJ871/3

 À LA TRAPPE D’AIGUEBELLE, 1927

«  Entre Sarras et Andance, dans un coin ensoleillé, j’ai fait passer dans l’estomac le pain qui restait dans mon sac, agrémenté de quelques bâtonnets de chocolat d’Aiguebelle, et je me sens capable d’affronter les 37 km. ½ de rampe plus ou moins constante qui aboutissent au col des Grands-Bois et qui ont toujours été un morceau dur à digérer au retour d’une longue excursion, même au temps où florissait l’École Stéphanoise, où Thorsonnax faisait en 17 h. les 320 km. de Saint-Étienne au col du Rousset et retour. Tout en grimpant à 8 à l’heure avec 3 m. 50 dans le 7 à 9 % du début, je trouvais étonnant que nous n’ayons jamais, en ce temps-là fait, de la Trappe d’Aiguebelle, le but d’une excursion dominicale.  »
[…]
«  En conversant ainsi avec moi-même, j’arrive à 13 h. 45’ à Bourg-Argental  ; en deux heures, j’ai fait tout juste 25 km. et je prévois qu’il me faudra au moins une heure et demie pour atteindre le col dont ne me séparent que 12 km., car je vais avoir contre moi un peu de vent contraire, un sol exécrable et 600 mètres d’élévation. Je me leste donc d’un café chaud et d’une pogne de Romans. La pogne me coûte 1 fr. 25 et le café 90 centimes, et cette dernière dépense porte à 18 francs et quelques centimes le coût total de cette excursion de deux jours  ; on peut donc encore voyager à bon compte, il suffit de savoir s’y prendre et de se comporter en cyclotouriste plutôt qu’en gastrotouriste. Mais je n’ai pas digéré ce prix de 90 centimes pour une petite tasse de café qui, au moment où le café et le sucre coûtaient 25 % de plus qu’aujourd’hui, était tarifée 75 centimes.  »
Vélocio, «  Excursions du “Cycliste” À la Trappe d’Aiguebelle  », Le Cycliste, Nov.-Déc. 1927, p.94-99, Source Archives Départementales de la Loire, cote IJ871/3

 EXCURSIONS DU “CYCLISTE”, MARS AVRIL 1929

«  Avant de partir, je me suis lesté d’une bolée de flocons d’avoine au lait, aliment très recommandable.  »

«  Deux heures après, j’étais à six kilomètres d’Orange et je m’arrêtais, près de Piolenc, dans un pré, sous quelques oliviers, pour déjeuner de pain, d’oranges et de bananes.  »
Vélocio, «  Excursions du “Cycliste” », Le Cycliste, Mars Avril 1929, p.30, Source Archives Départementales de la Loire, cote PER1328_15

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