Pavezin
mercredi 20 juillet 2022, par
Ce col du Pilat est proche de la vallée du Rhône, certaines routes y menant offrent un belvédère sur le fleuve et les Alpes (ci dessous vue tournée vers le sud-est on distingue Rochecourbe au niveau de la vallée de la Drôme).
C’était un lieu de meeting apprécié, particulièrement en automne, afin de s’instruire mutuellement de tout ce qui a trait au cyclotourisme, tradition qui s’est instituée. Ce col a vu passer beaucoup de diversité technique !
En 2019 se fêtait les 90 ans du dernier meeting auquel a participé Vélocio.
Sur le mur de l’auberge figure une plaque commémorative.
Jupiter Pluvius s’y est aussi souvent invité :
RÉUNIONS DU CYCLISTE, 1914
« Le 5 avril à Pavezin, ce n’a pas été une réunion, ce fut une déroute sous une pluie dont rien ne laissait prévoir la fin et qui dura, en effet, jusqu’au lendemain, avec quelques intermittences. Les routes furent dès le matin dans un état à faire reculer les plus braves, et cependant, à compter tous les groupes qui passèrent avant midi au col de Pavezin et ceux qui s’arrêtèrent au pied de la montée finale, tant à la Terrasse qu’à Sainte-Croix ou à Pélussin, nous aurions battu même le record de Lieudieu où l’on frisa la centaine.
Jupiter Pluvius a, cette fois, remporté la victoire, mais nous nous rattraperons le mois prochain et, d’ores et déjà, le consentement unanime de tous ceux que le mauvais temps a désappointés le 5 avril, a fixé au 17 mai prochain, à Serrières, hôtel Cuminal, la date d’une réunion de protestation contre les mauvais traitements dont le ciel, depuis quelques années, est par trop prodigue envers nous.
Le joli mois de mai nous doit une compensation, et le vaste hall de l’hôtel Cuminal sera trop étroit pour contenir tous les protestataires.
Dire en quelques mots les péripéties qui assaillirent le groupe dont je faisais partie, ce sera vous conter celles dont tous eurent à souffrir. Avec tant soit peu d’imagination, on peut aisément, à défaut d’un cinéma, se représenter par la pensée le col de Pavezin comme un pain de sucre à l’assaut duquel grimpent de tous côtés des groupes plus ou moins nombreux de cyclotouristes encapuchonnés.
Nous avions quitté Saint-Étienne à 8 heures, six tandems mixtes, un tandem masculin et ma triplette sur laquelle, Ch. et moi, emmenions une néophyte ; tous ces tandems armés de 6 ou 8 vitesses par whippet, conformément à l’idée souvent exprimée ici que, pour résister aux efforts de deux et à fortiori de trois équipiers, même avec manivelles décalées, il faut des changements de vitesse sans engrenages, c’est-à-dire des polychaînes ou des whippets. La chaîne flottante ne serait pas ici bien à sa place, car c’est le plus souvent une dame qui occupe la deuxième position.
Autour de ces huit polyplaces évoluaient maintes bicyclettes et, malgré le temps très incertain, j’eus le plaisir de constater qu’au départ les cyclettistes étaient fort nombreuses et qu’il y eut peu de défections.
Dès le début, une boue abominable, pire après Saint-Chamond, tant et si bien qu’en voulant croiser les rails du tramway, la triplette dérape soudain et nous voilà tous trois par terre, sans grand dommage puisque, étant le plus maltraité, je m’en tire avec une écorchure à la main et une forte contusion fessiale. Nous rassurons notre jeune équipière en lui expliquant qu’elle a encore deux pelles de même calibre à ramasser avant de pouvoir se dire bonne cycliste, et elle finit par trouver la chose toute naturelle. La maman survient, on lui explique l’accident en l’atténuant encore, et elle trouve aussi que tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes. La triplette, chose plus extraordinaire, car son contact avec le sol avait été rude, n’a pas même une pédale tordue ; seuls les guidons ont évolué à droite avec ensemble ; on les remet d’équerre avec le plan médian de la machine et l’on repart. Mais la leçon a servi à Ch..., qui nous conduira le reste du jour avec une prudence digne d’éloges.
Halte à la Terrasse-en-Doizieu, autant pour se lester un peu que pour se rallier et attendre une éclaircie. Nous sommes bientôt une vingtaine, et quelques-uns filent à Pavezin malgré la pluie battante. À 10 h. 40, il pleut toujours, mais la plus élémentaire politesse exige que j’aille au moins serrer la main des abonnés du Cycliste, que j’ai convoqués à cette pleine eau ; derrière Ch..., sur un tandem emprunté à un des jeunes ménages qui nous ont accompagnés le matin, nous enlevons en 40 minutes les 12 kilomètres de rampe, et j’arrive trempé comme un canard, car en traversant à grande allure d’innombrables flaques d’eau, j’ai reçu sur les pieds et dans les jambes des paquets de boue.
Autour d’un grand feu allumé en plein air, à la manière antique, trente, quarante cyclistes s’agitaient, bourdonnaient, s’interrogeaient. Vavitto d’Essantes était là, et sa verve humoristique lui suggérait déjà peut-être quelque fantaisie dont se réjouiront les lecteurs du Cycliste ; de nombreux Lyonnais étaient arrivés, d’autres plus nombreux attendaient encore à Sainte-Croix une éclaircie pour parachever l’ascension. Les amis du Chemineau, les amis de l’Audouard étaient nombreux aussi, groupés autour de leur constructeur. La plupart des tandems étaient munis de l’Hervier qui fut, avec le P d’A., le premier whippet dans la région et les divers whippets de la Gauloise qui n’ont jamais été industrialisés se voyaient sur quelques machines, ainsi que le Terrot et l’Alpin, ce nouveau venu qui semble de taille à passer rapidement au premier rang.
Nous constatons avec plaisir la solidarité qui s’établit tout naturellement dans notre région, tout au moins, entre le constructeur d’un système quelconque de polymultiplication et ses clients. De cette entente cordiale naîtront, certainement des perfectionnements incessants et dont profitera la communauté cycliste.
Et nous avons remarqué avec plus de plaisir encore dans nos dernières réunions, que la plus franche cordialité n’a jamais cessé de régner entre ces divers groupements, et que les critiques des différents systèmes présentés ont toujours été faites et écoutées avec courtoisie. Nous espérons qu’il en sera toujours de même. »
Vélocio, « Réunions du Cycliste », Le Cycliste, 1914, 73-75, Source Archives Départementales de la Loire, cote IJ871/3
Voici un de ces meetings, au printemps celui-là, où le cabcyclisme fut à l’honneur :
Meeting de Printemps,30 mai 1920, Juin 1920.
Nous ne nous sommes pas trouvés très nombreux à Pavezin, le 30 mai dernier ; le temps trop mauvais jusqu’à neuf heures s’étant opposé au départ de bien des cyclistes qui nous en ont exprimé leurs regrets, mais nous y avons vu des nouveautés très intéressantes et l’enseignement mutuel a marché bon train. On s’est communiqué des idées, on a pris des notes et l’on s’est promis de présenter la prochaine fois des appareils plus perfectionnés encore pour le transport des enfants, voire des grandes personnes.
C’est que ce meeting fut essentiellement un meeting d’enfants et le cabcyclisme y tint beaucoup de place. M. Th... avait amené de Saint-Vallier sa jeune femme à bicyclette et, dans une remorque une peu lourde, mais très confortable, sa fillette de trois ans qui n’avait certes pas l’air de se trouver mal de ce long voyage. M. M..., de Bourg-Argental, arriva un peu plus tard sur une bicyclette de dame équipée pour transporter dans un petit siège, sur la roue avant, un bébé de deux ans et dans un autre fauteuil, sur la roue arrière, un garçonnet de trois ans. Au-dessus de chaque siège est installé à demeure un parasol que j’aurais préféré détachable, car le soleil n’est pas toujours à craindre et le vent a beaucoup de prise sur ces toiles tendues. Malgré le poids supplémentaire des deux enfants, la bicyclette, convenablement polyxée, n’est pas dure à propulser même à la montée.
De Saint-Etienne, M. B... avait amené sa grande fillette de 8 ans, pédalant sur une roue attelée latéralement à sa bicyclette et qui constitue une véritable nouveauté digne de retenir l’attention, car cette solution convient tout aussi bien pour le transport d’un adulte et paraît infiniment plus pratique que la monodame. Cette roue occupe par rapport à la bicyclette la position de la roue d’un sidecar, mais le passager au lieu d’être assis entre les deux roues est assis au-dessus de la roue même dont le moyeu spécial comporte un axe de pédalier avec ses deux manivelles. Le passager peut donc pédaler et par un système facile à imaginer avoir un changement de vitesse en marche à sa disposition. Cette roue est attachée à la bicyclette par trois points : 1° à la douille de direction ; 2° derrière la selle ; 3° à l’extrémité inférieure arrière du garde-boue naturellement renforcée par une fourche supplémentaire. La roue latérale, elle, a trois fourches, l’une verticale soutient la selle, l’autre horizontale soutient l’extrémité inférieure arrière du garde-boue, la troisième horizontale aussi soutient à la fois l’extrémité inférieure avant du garde-boue et l’axe secondaire de renvoi sur lequel est installé le dispositif de changement de vitesse. Au-dessus du garde-boue court un tube qui entoure la moitié supérieure de la roue et va ensuite se fixer à la douille de direction, non pas rigidement comme cela a lieu avec les sidecars, mais par une sorte de charnière ; les attaches des deux autres tubes de jonction sont également à charnières à chacune de leurs extrémités de sorte que la roue latérale et la roue motrice de la bicyclette restent toujours parallèles entre elles, quelle que soit la différence de hauteur des plans sur lesquels elles reposent. Et l’équilibre de la bicyclette n’est en rien contrarié.
Cette solution a paru très heureuse nous croyons qu’on en verra d’autres exemplaires à notre futur meeting ; nombreux sont en effet les pères ayant des enfants assez grands déjà pour pouvoir pédaler et n’osant pourtant pas les laisser aller seuls sur la route si dangereuse aujourd’hui.
On nous apprit aussi que, s’il ne s’agit que de porter un fardeau, on peut atteler très simplement une roue porteuse à la roue motrice d’une bicyclette sans détruire l’équilibre d’icelle. Cette roue-porteuse ne pèse, barre d’attelage comprise, que 4 kilos et peut porter 50 kilos. Celle que nous vîmes a 50 centimètres de diamètre avec pneus très souples de 50 m/ m environ ; elle est fixée sur un moyeu tubulaire par 16 rayons tangents à tête coudée ces rayons pourraient être directs sans inconvénients : le moyeu peut être à billes, mais il est actuellement à roulement lisse ce qui n’a pas grande importance au point de vue du rendement à la condition que les parties frottantes soient bien lubrifiées : l’axe du moyeu est un tube de 25 m/m long d’environ 50 centimètres et qui se termine par un T de 10 centimètres. Ce T s’accroche par une charnière à une pièce correspondante fortement fixée au tube de chaîne et à l’axe de la roue motrice de la bicyclette. Ici les deux roues ne sont parallèles que lorsqu’elles se trouvent sur la même plan ; dans les virages elles tendent à former entre elles un ongle plus ou moins prononcé, et si l’on soulevait à la main la roue porteuse autant que le permet la charnière de jonction ; on la coucherait transversalement au-dessus de la roue de la bicyclette ; cette position est même utilisée quand la roue porteuse n’est pas chargée et qu’elle bondirait trop à tort et à travers sur le sol si on l’y laissait reposer.
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Parmi les soixante et quelques machines qui passèrent au col entre 9 et 15 heures, moyeux, whippet, polychaînes et flottantes furent. comme toujours, le plus grand nombre, mais nous eûmes le plaisir de voir trois rétro-directes. parmi lesquelles la machine même du regretté capitaine Perrache, dont notre vieil ami. P. F.... d’Annonay, est aujourd’hui l’heureux propriétaire.
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Les dames étaient nombreuses, plus nombreuses proportionnellement qu’à Duerne et j’avoue que plus nous irons, plus, espérons nous, elles apprécieront la joie de vivre au grand air en se livrant à une exercice modéré qui avive les sensations, éveille l’appétit, fouette la circulation générale, bref, conserve et fortifie la santé, le plus précieux des biens. Il suffit, pour que cet espoir
se réalise que nos meetings conservent la bonne tenue et la cordialité qui d’ailleurs ne leur ont jamais défaut mais qui, à Pavezin, furent manifestement la note dominante.
Le déjeuner tiré des sacs a fait merveille ; de tous les côtés, quand 12 heures sonnèrent, on s’installa par petits groupes sur l’herbe ou au tour des tables mises à notre disposition par les trois hôteliers du lieu qui eurent, en outre, chacun son contingent de dîneurs très satisfaits et du menu et des prix modérés.
Quatre audax stéphanois s’étaient princièrement installés sous une tente et préparèrent un beau repas chaud, café compris, sur un feu de bois qu’un joli vent du nord se chargeait d’attiser. L’ensemble fut pittoresque au possible et si la maréchaussée avait passé par là à l’heure prandiale le brigadier n’eût pas manqué de s’en étonner...
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Notre présence en si grand nombre à ce col si paisible et qui ne s’anime un peu qu’aux arrivées (deux fois par jour) du galochard de la région, n’alla d’ailleurs pas sans éveiller des craintes dans l’esprit de quelques estivants qui, dûment emmitouflés, promenaient au soleil leurs rhumatismes. L’un d’eux se hasarda même à me demander, car je lui paraissais et j’étais, hélas ! le doyen, quel était le but de cette réunion ; je le lui expliquai et j’espère qu’il ne nous a pas pris pour des conspirateurs.
A 15 heures, on se sépara et par les quatre points cardinaux les groupes se dispersèrent non sans s’être donné rendez-vous au prochain meeting d’automne dont la date n’est pas fixée non plus que le lieu. Quelques-uns suggérèrent même qu’un meeting d’été et que des excursions dominicales mixtes entre les divers groupements de Lyon, de Saint-Etienne et d’ailleurs seraient très utiles. Cela est vrai et sitôt que « Le Cycliste » pourra reparaître mensuellement nous tiendrons compte de ces desiderata et nous essayerons d’organiser de plus fréquentes réunions suivies d’une excursion en commun. Il est bon que les cyclotouristes se sentent les coudes de plus en plus et disent qu’ils sont le nombre donc la force, que la bicyclette de tourisme a besoin encore d’être perfectionnée et que la standardisation, même limitée aux pneus, est une ineptie.
Velocio.
Le Cycliste 1920, Source Archives départementales de la Loire, cote IJ871/3
Au dernier moment, nous recevons de notre collaborateur Vavitto d’Essantes (alias. M-Th...), le cliché ci-dessous qui représente la confortable remorque que M. Th... attelle à sa bicyclette et dans laquelle il transporte sa fillette. Mais le cliché ne va pas sans une pointe d’humour qu’il faut pardonner à V. d’Essantes, coutumier du fait :
Meeting d’Automne (Pavezin, 1921)
« Bien que le 23 octobre dernier, le temps nous ai fait grise mine, notre meeting au col de Pavezin a eu le succès habituel, et nous nous sommes trouvés plus de quatre-vingts cyclo-touristes, venus de tous les coins de l’horizon.
M. et Mme Prat étaient venus de Paris tout exprès pour y assister et nous apporter les sympathies de l’A.C.P., où le cycliste compte beaucoup d’amis. Les lyonnais étaient nombreux, les stéphanois plus nombreux encore, et Bourg-Argental, Annonay, Chasse et autres lieux furent représentés. Peu de dames, peu de tandems, un seul appareil de cabcyclisme, le porte-bébé toujours admiré de M. Martin. La pluie du matin avait, contrairement au dicton, arrêté quelques pèlerins. Il soufflait là-haut un vent sauvage et froid et de courtes averses alternaient avec de chauds rayons de soleil. Le temps changeait et, après la période de beaux jours se succédant sans interruption depuis le mois d’août, nous allions entrer sans transition en plein hiver. De fait, nous fûmes favorisés de la dernière à peu près belle journée de la saison.
La surprise de ce meeting fut la soudaine arrivée d’une douzaine de jeunes cyclotouristes lyonnais, groupés dans une Société de fondation récente, Le Lyon Routier, dont le président nous déclara tout net qu’il ne partageait pas nos idées sur ce que doit être la bicyclette de tourisme ; que lui et les siens ne montaient que des machines légères équipées comme celles des coureurs du Tour de France, boyaux, roue à retournement et deux développements, 4 m. 80 et 5 m. 80 ou 4 m. 25 et 5 m. 25 ; et qu’il tenait nos polys pour machines à faible rendement, ne permettent ni les allures vives, ni par conséquent les longues randonnées.
Je fus un peu surpris, car depuis longtemps nous n’avons plus eu à faire de ces expériences comparatives sur le terrain, qui furent, il y a vingt ans, monnaie courante à l’E. S. Nous voilà donc avec quelques belles randonnées en perspective pour le printemps prochain. À la vérité, le Lyon Routier est déjà des nôtres puisqu’il s’est armé de deux développements et le débat n’aura lieu qu’entre deux dispositifs de polyxion, le système primitif limité à deux développements, trop rapprochés à notre avis, et les systèmes modernes qui admettent une gamme plus complète de développements interchangeables en marche.
De ces derniers systèmes il y eut grande variété à Pavezin. Des bi-chaînes combinées avec flottantes ou avec moyeu 3 vitesses, des flottantes seules ou combinées avec moyeux à 2 et à 3 vitesses, ma vieille trichaine de 1904 à roues de 60 centimètres, les trois dispositifs de rétro qui ont survécu, Hirondelle, Magnat et Terrot, puis des dérailleurs, encore des dérailleurs, toujours des dérailleurs. Les Chemineau, comme d’habitude, remportaient de beaucoup par leur nombre, puis les As, qui lentement mais sûrement se font leur place au soleil et les Audouard. Le Chemineau présentait un nouveau type à 2 vitesses seulement qui, comme l’As, double très avantageusement le 2 ou 3 vitesses d’un moyeu à engrenages. Ces derniers étaient en comme assez nombreux, mais presque toujours en combinaison avec d’autres systèmes.
Le vent tournait de plus en plus à l’aigre, on avait pris le café, échangé maints joyeux propos, on avait fait une abondante cueillette de beaux marrons tombés sur la route et abandonnés, les photographes braquèrent leurs appareils et les mains se serrèrent une dernière fois. À 14 h. , tout le monde s’ébranla et, en compagnie de quelques amis, je hissai mon carrosse de gala à la croix de Chaubourey, où régnait déjà un brouillard glacial, qui dans la nuit se tranforma en une épaisse couche de neige.
Ainsi finit notre troisième meeting de 1921. Trois meetings en une année, c’est peut-être le record ! À tous, nous nous trouvâmes cependant très nombreux et l’on y vint même de loin. Ceci démontre que les cyclotouristes sont gens sociables, aimant à se rencontrer fréquemment et je crois que si l’on pouvait provoquer de telles réunions dans toute la région elles auraient partout beaucoup de succès. »
Vélocio, Le Cycliste, 1921, Archives départementales de la Loire cote IJ871/3
UN DEUXIÈME MEETING DE PRINTEMPS, 1922
« Très mouillé, cette année, notre meeting du 9 avril, à tel point qu’arrivé seul au col de Pavezin dans une brusque rafale de vent du nord accompagnée d’une pluie froide et serrée, avec un clou dans mon pneu, j’eus un instant la pensée de rebrousser chemin, on ne voyait, en effet, de cet observatoire qui domine si complètement la vallée du Rhône, que vagues de brouillard et nuages de pluie alternativement chassés vers le sud ou vers le nord par les vents qui se livraient bataille dans l’immense cirque. Après avoir réparé, je me mis cependant en route, mais une telle bourrasque m’assaillit avant Pélussin, que je remontai dare-dare au col pour y déjeuner et attendre les événements. Il ne fallait en somme qu’une petite heure pour descendre du col à Saint-Maurice où je pouvais être à midi, même en ne partant qu’à 11 heures. Or, je trouvai au col un groupe de onze chemineaux-touristes, parmi lesquels un tandem mixte, et, les voyant tous décidés à braver les intempéries, j’eus honte d’avoir hésité un instant. On déjeuna et l’on repartit à 10 heures. La route était effroyablement détrempée ; nous ne tardâmes pas à rencontrer un trio de cyclistes stéphanois qui, moins courageux, laissaient là le meeting et rentraient. Avant 11 heures, nous traversons St-Maurice et nous mettons enfin pied à terre au carrefour désigné pour le lieu du rendez-vous. Une douzaine de cyclotouristes nous y attendaient et j’eus le plaisir de revoir des amis que je n’ai pas l’occasion de rencontrer ailleurs qu’à ces réunions périodiques et qui avaient cette fois affronté un bien mauvais temps pour s’y trouver. Ce fut donc une réunion toute intime que Mme P... anima de sa gaieté naturelle et d’une bonne humeur inaltérable.. Elle fut justement félicitée d’avoir tout bravé pour que le sexe aimable fût représenté à notre meeting de printemps. La bise glaciale qui venait du nord mit bientôt fin à nos palabres et l’on se sépara à midi pour aller déjeuner ici et là, non sans avoir décidé que ce meeting ne compterait pas et qu’on se réunirait de nouveau le juin prochain, à Notre-Dame-d’Ai. »
Vélocio, « Un 2e meeting de printemps », Le Cycliste, Mars-Avril 1922, p.24-26, Source Archives Départementales de la Loire, cote PER1328_13
EXCURSIONS DU CYCLISTE juillet août 1924
« Je ne suis plus bien loin de Maclas quand je constate, surprise agréable, qu’au loin, devant moi, la voûte céleste s’azure et s’ensoleille. Mon ardeur en est accrue et les pédales me semblent légères. Pélussin est bientôt derrière moi et j’enlève, sans discussion, avec mon grand développement les huit kilomètres de rampe douce qui aboutissent au col de Pavezin, où je mets pied à terre à 14 heures précises. Le soleil y brille de tout son éclat, mais une bise froide y souffle de toute sa force ; j’ai naturellement très chaud et je risque d’avoir très froid si je ne prends pas quelques précautions. Pour ménager la transition, je passe trente minutes dans l’atmosphère tiède d’une salle d’auberge, juste le temps d’absorber, selon les règles, un bol de café au lait, avec pain et beurre, qui sera toute ma dépense de la journée ».
Vélocio, « Excursions du “Cycliste” », Le Cycliste, juillet-août 1924, p. 80-83, Source Archives Départementales de la Loire, cote PER1328_14
Meeting d’automne, 1929
« Le col de Pavezin, belvédère merveilleux ouvert sur la vallée du Rhône toute proche et les Alpes lointaines, a offert le 29 septembre dernier, entre 9 heures et midi, un spectacle étonnant. A chaque instant, par les quatre routes qui y aboutissent, arrivaient des cyclistes, et encore des cyclistes, et toujours des cyclistes, tantôt isolés, tantôt en groupes et parfois en pelotons, précédés de fanions et accompagnés du vacarme de tous les appareils sonores imposés par le règlement. Et ces cyclistes venaient souvent de loin ; quelques-uns avaient pédalé toute la nuit, et d’autres avaient quitté Paris dès l’aube, samedi, pour être à Pavezin dimanche avant midi. Mais dans quel but, se demandent les profanes, pourquoi tant d’efforts, interrogent les autoïstes paresseux ? Je vais le leur dire.
Ces deux ou trois cents cyclotouristes qui surgissent de tous les côtés, viennent ainsi, tous les ans, passer quelques heures ensemble et s’instruire mutuellement de tout ce qui a trait au cyclotourisme, leur sport favori. Ils s’interrogeront sur les excursions qu’ils ont faites cette année, sur les sites qui les auront particulièrement intéressés, sur les nouveautés qu’ils auront vues et les perfectionnements qu’ils rêvent d’apporter à leurs montures. Hôtels, camping, équipement, photographie, alimentation en cours de route, vêtement..., que sais-je encore, autant de questions qui vont être agitées entre eux, et maints renseignements utiles seront donnés avec libéralité et reçus avec reconnaissance.
Comme la nature aujourd’hui s’est mise en frais pour les recevoir, que le col de Pavezin est facile d’accès, que le temps est merveilleux, que le soleil et une brise légère tempèrent agréablement l’atmosphère, que la vue, quoique un peu bornée par la brume lointaine, reste néanmoins très étendue, bref que tout est à souhait pour le plaisir de l’âme et le bien-être du corps, tout le monde est arrivé frais, dispos et d’humeur joyeuse. La conversation s’en ressent, les discussions restent courtoises et je doute qu’on ait jamais vu une meilleure tenue et plus d’aménité entre gens qui soutiennent et défendent cependant leurs idées techniques et touristiques avec force et conviction.
Les trois tandems parisiens, qui arrivèrent au moment où la réunion battait son plein, furent accueillis avec les applaudissements que méritait une si belle démonstration de la valeur de ce merveilleux outil de transport. Nos amis (et parmi eux se trouvait une jeune équipe conjugale qui a droit à notre plus vive admiration) venaient de couvrir 550 km. en trente et une heures. Dix minutes après leur arrivée, débarrassés de la poussière de la route, ils paraissaient aussi peu fatigués que nous qui venions simplement de Lyon ou de Saint-Étienne. C’est un beau résultat à beaucoup de points de vue. Nous avions d’ailleurs déjà vu arriver dans la matinée, des cyclotouristes, de lieux relativement éloignés, de Roanne, par’ exemple, à 120 km., et même de St-Nectaire, à quelque 200 km. Il est donc amplement démontré que la bicyclette rapproche étonnamment les distances et concurrence avantageusement l’automobile, pour peu que l’on fasse entrer en ligne de compte les frais de revient d’un déplacement. »
Vélocio, « Meeting d’automne », Le Cycliste, 1929, p.76-79, Source Archives Départementales de la Loire, cote PER1328_15
2019
En route pour Pavezin
Au col
Le discours d’Henri Bosc, l’apôtre du 650B